miércoles, 2 de noviembre de 2016

Pour une présence féminine plus incisive

Le Pape François est clair ; il demande d’ « étudier les critères et les modalités nouvelles pour que les femmes se sentent pleinement participantes des différents domaines de la vie sociale et ecclésiale. » (7 février 2015).

Le Pape François est clair… mais il est clair, aussi, que ses paroles résonnent dans le vide. Personne ne semble savoir comment prendre la question… et, sans doute, certains ont peur d’ouvrir la boîte de Pandore et de ne plus être capables de maîtriser la situation. Comment avancer ?

Il convient d’abord de faire le point. Nous avançons dans la vie au cœur d’une culture donnée, qui est notre horizon. L’horizon actuel –qu’on le veuille ou pas- est marqué par la démocratisation et par la reconnaissance de l’égale dignité de l’homme et de la femme : la position de l’Église à l’égard des femmes, vue en perspective de cet horizon, est devenue strictement incompréhensible pour la plupart de nos contemporains.

Beaucoup de femmes aujourd’hui vivent leur foi –le cœur de leur vie- en tension, voire en contradiction avec leur horizon. Et cela d’autant plus que, dans des domaines intimes, l’Église leur semble dicter une conduite plutôt qu’éduquer leur liberté et leur faire confiance. Nous pouvons faire remarquer (à juste titre) que les femmes exercent des responsabilités de plus en plus importantes au sein des paroisses, des diocèses, ou au sein des mouvements et des services… mais cela ne semble être que des concessions faites pour sauver le pouvoir masculin.

Il est vrai que les chrétiens ne se situent pas seulement par rapport à l’horizon. Nous marchons à « l’étoile », et nos manières de faire se veulent inspirées par la Révélation. Or, personne ne peut nier la place prépondérante donnée par le Christ aux apôtres –tous masculins-. Il est difficile d’arguer qu’à l’époque, il eût été difficile qu’il en fût autrement, tant, de La Mecque à Rome, les femmes avaient une place souvent première dans les cultes méditerranéens de l’époque. Jésus, en choisissant les apôtres, l’a fait sciemment alors qu’à maints égards il s’est comporté dans son rapport avec les femmes avec une grande liberté par rapport aux mœurs de son temps.

Il est impossible de changer la Révélation. Ce qui est écrit est écrit. Mais l’horizon actuel oblige à regarder à nouveaux frais ce qui est écrit. Non pour nier ce que l’on y a toujours lu, mais pour découvrir une vision plus riche de la Révélation.

Or, comment ne pas voir le rôle premier des femmes à des moments très importants du récit
évangélique ?

Élizabeth est la première à parler du Christ comme Seigneur, les femmes furent les premières à annoncer la Résurrection… Le Pape ajoute : « les premières à croire ». Il faudrait analyser le rôle de la Cananéenne, qui fit prendre conscience à Jésus d’une autre manière d’accomplir sa mission pour le monde… et je ne parle pas de Marie qui, à maints égards, fut « la première en chemin ».

Nous pourrions être tentés de chercher à définir un rôle masculin et un rôle féminin à partir de ce regard fragmenté sur la Bible. Ce serait probablement prolonger la vision du monde du passé. Au fond, nous avons longtemps été marqués par la théorie des deux glaives, le glaive spirituel destiné à être manié par les hommes –clercs- et le glaive matériel, placé dans les mains laïques –souvent masculines, mais pas exclusivement-. Très vite, reconnaître un rôle masculin et un rôle féminin conduirait à répartir les tâches et le pouvoir d’une manière analogue à celle du passé.

Le regard actuel sur la Bible voit que l’homme et la femme y sont toujours relation et que, probablement, l’anthropologie biblique invite à penser que ce qui constitue l’homme comme homme et la femme comme femme est la relation. Chacun se trouve en regard de l’autre. Seule la relation
donne une fécondité aux uns et aux autres. Les grandes étapes de la vie, naissance à soi-même par le désir, mise au monde d’autrui, soin des faibles, présence-absence aux forts, se vivent au cœur d’un rapport homme-femme.

La question du Pape est bien d’établir ces rapports, qui seuls assurent une fécondité durable… ces rapports où les femmes seraient pleinement participantes à la vie de l’Église. Il ne s’agit pas de définir a priori ce qu’il conviendrait de faire. Il s’agit d’établir une relation devant Dieu pour le chercher ensemble, homme et femme. À vrai dire, cela n’est pas complètement nouveau. Dans maints Synodes diocésains, cela s’est fait –même si, souvent, ces Synodes ont été mutilés pour ne pas aborder précisément la question du rapport homme – femme. Cela pourrait se faire facilement en amont de chaque assemblée plénière de la conférence épiscopale, Synode des évêques, dans les conseils épiscopaux, en en préparant le travail avec des groupes de laïcs choisis pour leur compétence ou élus (et donc mixtes).

Le Pape François aime à faire « l’éloge de la réciprocité dans l’équivalence »… de « façon à satisfaire véritablement la plénitude de la personne » (7 février 2015). Il rappelle qu’un monde où les femmes sont marginalisées est un monde stérile (7 février 2015). Face aux difficultés actuelles de l’Église… le Pape demande une présence féminine plus incisive. Et si nous disions : « Chiche ! » ?

+ Mgr Michel Dubost
Évêque d’Évry - Corbeil-Essonnes
le 31 octobre 2016




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